"Une Suisse sans armée" n°44, hiver 99, p. 24

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L’armée ne sert a rien, supprimons-la!

Commentaire de Manuel GRANDJEAN dans Le Courrier du 26.10.1999

113299 signatures valables pour l’une, 110108 pour l’autre. La Chancellerie fédérale a annoncé hier l’aboutissement formel des deux initiatives du Groupe pour une Suisse sans armée (GSsA). Au lendemain de la déferlante brune sur la Suisse, ce succès fleure l’espoir. II montre que, dans ce pays, il n’y a pas que des citoyens-hérissons, tétanisés sur leur bout d’herbe verte, tous piquants hérissés.

Comme il y a dix ans, le GSsA ne propose rien d’autre que la suppression pure et simple de l’armée helvétique et son remplacement par une politique de paix efficace et ouverte au monde. Laquelle prendrait corps sous la forme d’un "service volontaire pour la paix".

II vise juste pour au moins trois raisons.

Primo - disons-le tout de go - l’armée suisse ne sert à rien. Ou alors à écouler quelques poches de fiel pour une poignée de frustrés, trop contents d’avoir durant un temps un pouvoir démesuré sur leurs concitoyens. Que l’armée n’a plus d’utilité, tout le monde le sait, à commencer par les plus hautes autorités du pays. La preuve? La commission officielle dirigée par l’ex-ambassadeur Edouard Brunner le disait déjà dans son rapport en juillet 1998: l’armée suisse est efficace pour lutter contre les menaces du passé, mais elle n’est plus adaptée pour prévenir les dangers actuels. N’osant pas tirer les conséquences qui s’imposent, notre pays s’est donc ingénié à recycler l’appareil militaire en lui donnant toutes sortes de nouvelles tâches.

Nettoyage des rivières et des forêts, aide en cas de catastrophe naturelle? Très utile, mais ce n’est pas le rôle d’une armée. Renforcement de la police, comme en mars de cetté année à Genève? Une recrue armée dans la rue, c’est la porte ouverte à tous les dérapages. Genève, précisément, se souvient du drame de 1932. "Encadrement" des réfugiés? Pas vraiment adapté pour des gens qui viennent de fuir la violence. Envoi d’une mission non armée au Kosovo? Des volontaires sans armes, cela ressemble beaucoup - en moins clair - à un "service volontaire pour la paix"...

Tout cela ne saurait justifier la conservation d’un dinosaure gris-vert fâcheusement coûteux. C’est d’ailleurs le deuxième aspect de la question: le rapport prix/service rendu à la collectivité est abyssal. Et ce sont les mêmes qui votent les yeux fermés des milliards pour acheter des armes et proposent de diminuer les rentes AVS ou AI pour économiser quelques millions.

Tertio, comme l’affirme le GSsA, les risques aujourd’hui sont essentiellement imputables aux déséquilibres. Entre possédants et dépossédés. En Suisse, comme dans le monde, I’insécurité est économique, sociale, sanitaire, environnementale, avant d’être militaire. Le rapport 1999 du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) rappelle que, sur la planète, 1,3 milliard de personnes vivent avec moins d’un dollar par jour, 160 millions d’enfants souffrent de malnutrition et 250 millions travaillent, 12 millions d’humains sont en exil, 3 millions de personnes meurent chaque année des conséquences de la pollution atmosphérique, et que, en sept ans, le nombre de personnes infectées par le VIH a doublé. Contre cela, une poignée de F/A-18 ne peut rien.

In fine, l’investissement dans une politique de paix active n’est pas uniquement une question d’idéal. Elle est une question de sécurité objective. Ceci, même un agrarien devrait pouvoir le comprendre.