"Une Suisse sans armée" n°38, été 1998, p. 7

Kosove

Escalade sans alternative?

La spirale de la violence progresse en Kosove. Des centaines de morts, des milliers de personnes chassées. Les Forces de "sécurité" serbes "nettoyent" et dévastent des grandes parties du territoire à la frontière avec l'Albanie.

Milosevic cherche la guerre. Pour défendre son pouvoir, il veut proclamer l'état d'urgence et neutraliser les forces démocratiques et les médias indépendants. Mais aussi l'UÇK, l'armée de libération des Albanais de Kosove, mise sur une escalade de la violence jusqu'à l'intervention de l'OTAN pour réaliser l'aspiration à l'indépendance.

Ces développements rappellent de près le début de la guerre en Croatie: fin 1990, les régions peuplées par une majorité de serbes en Croatie proclamèrent leur indépendance de la Croatie et formèrent leur propre Etat, la Republika Srpska Krajina (RSK). En été 1995, l'armée croate avait conquis ces territoires et les réintégra à l'Etat croate. Qu'est-il resté du désir d'autodétermination de la population serbe? Rien d'autre que la fuite en masse (vers la Bosnie serbe et vers la Serbie), le désespoir, la terre brûlée et la misère humaine. La population albanaise de Kosove risque un destin similaire si elle suit la stratégie militaire de l'armée de libération UÇK. Militairement et politiquement la lutte armée contre la domination serbe n'a aucune chance. Malgré cela, nourrie du désespoir, elle suscite des adhésions massives. La politique internationale n'a pas voulu, jusqu'à aujourd'hui, prendre au sérieux les concepts et les propositions politiques des forces d'opposition qui existent dans les deux camps. Pour masquer son incapacité, sa faillite de ces derniers quinze années, elle se cache une nouvelle fois derrière les menaces d'une intervention militaire.

Et la Suisse? Son problème principal c'est de trouver le moyen de se défaire d'un maximum de réfugiés kosovars déboutés, sans que son image de pays "humanitaire" en prenne un coup trop sérieux.

Roland Brunner, coordinateur de la "campagne anti-guerre" du GSsA-Zurich